Je signe mon grand retour à la fac — de Rennes probablement. Je connais si bien le système, ce qu’il s’y dit, ce qu’il faut paraître et comment se débrouiller que je dois être d’une nonchalance insupportable.
Je suis le dernier à prendre place en cours, mais j’ai le plus grand mal à trouver un siège, car les autres, à cause de la distanciation sociale, refusent que je m’assoie à côté d’eux. C’est un cours de lettres niveau master. Avant que j’arrive, les étudiants ont peint des aquarelles grotesques représentant des thèmes littéraires. Parmi eux, le fatum (destin) est surreprésenté.
Je ne comprends pas tout ce qui se passe dans ce cours, qui n’en est d’ailleurs pas un. Les étudiants doivent choisir un livre ou un corpus d’ouvrages à étudier. Ils semblent très savants et ça m’agace. Ils souhaitent travailler sur des auteurs dont j’ignore jusqu’au nom. — D’habitude, c’est moi qui fais ça ! Au fond de la classe, une élève suggère de travailler sur l’oeuvre de Malache Inn…
Dans la salle, il y a deux profs. Une aux cheveux courts, exigeante, qui semble bien connaître ces étudiants ; l’autre plus rond, cheveux bruns et brillants, mi-longs, que j’associe bizarrement à Patrick Chamoiseau. Vers la fin de l’heure, la prof sévère commence à peine le cours en s’écriant : « moi, toute la peinture germanique, je baise ! » Elle veut dire qu’elle adore, et tout le monde la comprend sans relever la familiarité.
Le second prof, après qu’un élève lui a demandé s’il pouvait travailler sur Volodine, répond qu’il serait préférable de travailler sur des extraits traduits de la Bible, car son cours à lui porte sur l’électro-maniérisme. Je suis un peu perdu.
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