Uncut Gems, vu pour la seconde fois, exceptionnel de tension et de mouvement. C’est plus fort que lui, Howard ne peut pas s’arrêter. Parle, mise, gigote, se déplace en permanence, et déplace avec lui tout son monde – expression primaire de notre temps où la propriété est réduite à un certificat à vendre ou racheter au gré des circonstances.


Mômes m’ont passé dessus comme un trente-huit tonnes.

Parfois je me demande – non, je me demande en permanence – où est passé la transsubstantiation qui agissait il n’y a pas si longtemps encore au fond de moi, et changeait en mots phrases et paragraphes des sensations à-pic. Aujourd’hui, je reste neutre et inchangé.

Quelques notes sur Munch ; imagine le vieil homme à Ekely dans son immense cabane, la chambre jonchée de feuilles, de toiles, et au-dehors son atelier de plein air.


La soirée avec C. dans ce bar de la Goutte d’Or où, chose étonnante, tout le monde se salue en entrant. Les uns viennent dans la conversation des autres et les petits ballons d’alcools bruns s’enchaînent avec rigueur. Rencontre A., habituée, qui enregistre ces jours-ci avec l’aide d’une flûtiste et d’un joueur de oud une mise en voix du Bateau Ivre – on se dit pour le plaisir : « et les péninsules démarrées / n’ont pas subi tohu-bohus plus triomphants ».

J’apprends également l’existence du musée Rimbaud d’Harar, en Éthiopie, où est moins célébrée sa poésie, paraît-il, que les ventes de ses fusils aux Éthiopiens pour soutenir la guerre contre le Yemen.


Lyon. Vu M-C., avons causé quelques heures – si longtemps que nous n’avions pas causé –, j'aurais aimé que cela dure la nuit.

Ces derniers jours, parce que je repense aux rêves, au problème des rêves et à ma frustration de ne pas en faire (c’est-à-dire de ne pas m’en souvenir, cela revient au même) – eh bien je me remets à faire des rêves, des rêves horribles : ma mère qu’on ampute de l’avant-bras et à qui l’on greffe une main perpendiculaire au coude sur le moignon ; et un truc ce matin aussi avec mon père, affreux également mais trop diffus pour que je puisse en dire le moindre mot. Je dois poursuivre dans cet état d’esprit ; je dois m’occuper plus attentivement de mes rêves. – L’autre soir je disais à J-E. : mes rêves sont si rares qu’ils me sont précieux.


Rêve : rejouer la bataille de Stalingrad en mimant un fusil avec les mains comme font les enfants. Observer du mouvement entre des monceaux de déchets qui forment des collines. Mettre en joue de furtives silhouettes qui ressemblent à ? (J’étais là assez proche d’un rêve, j’espère que j’y serai entièrement cette nuit)

Journée pesante ; je perds patience devant les enfants. Les moments de réussite sont si rares.

Les Watères du chateau – peu nombreux les bouquins où je me réjouis d’être enfin le soir pour passer un bon moment.


Calculs d’heures, bmp, ime, temps partiel à 14,4 ou 14,5 – la différence, paraît-il, est sensible – du genre sensible à me niquer l’année prochaine. Les collègues, eux, jonglent aisément avec ces chiffres, et je me sens moi comme un de ces petits teubés mignons de sixième à qui on explique en vain le triangle.


Dernier 10x400 de la préparation. Moyenne de 3’45/km au 400. Résultats similaires à la semaine dernière. Toujours pas de rêve. Il me faudrait une méthode pour obtenir des rêves.